Pour faire un gâteau ou un pain, il faut commencer par la pâte. Et pour abaisser la pâte, il faut sortir son rouleau à pâtisserie. Chaque cuisine en possède un, c’est le plus ancien et le plus indispensable ustensile de l’histoire de l’alimentation humaine.

Les premiers rouleaux apparaissent déjà sur les représentations murales de l’Ancienne Egypte. Les Étrusques, eux aussi, semblaient apprécier l’utilité de l’objet autant que nous. Que ce soit le ciabatta italien, la pita du Moyen Orient, les piroghis du monde slave ou les chapatis du continent indien, le rouleau s’est toujours avéré utile.

De notre temps, il garde toujours sa forme primitive proche d’un cylindre de 30 à 40 cm de long, mais cela ne veut pas dire qu’il n’a jamais changé. Au long des siècles, l’ustensile à aplatir la pâte s’est confectionné en différentes matières, suivant ce que l’époque pouvait proposer. Un simple bâton ou bouteille en verre ont laissé place aux rouleaux en marbre, en bois ou en céramique, cylindriques ou en fuseaux. L’objet autrefois très simple devenait de plus en plus sophistiqué.

 

Une grande variété pour de multiples usages

De nos jours, les versions proposées de cet objet sont extrêmement variées. Certains rouleaux sont munis d’une poignée, d’autres, de deux, les troisièmes, les plus répandus, n’ont pas de poignées du tout. Les poignées peuvent être fixes ou tournants, et le rouleau lui-même ajustable en longueur. Le choix dépend non seulement des préférences personnelles mais également de la pâte à étaler, plus ou moins épaisse.

Les rouleaux qui façonnent les raviolis ou qui sont quadrillés comme une règle d’écolier pour des biscuits d’une taille idéalement précise, ou encore qui, remplit à l’intérieur d’eau chaude ou froide, aident à étaler la pâte dure ou molle… L’invention la plus récente est le rouleau aux anneaux amovibles, avec dessins. Et si on met entre les anneaux des roues fines et aiguisées (sorte de roulette à pizza), on n’a plus même à découper les biscuits: le rouleau le fait tout seul. L’objet vieux comme le monde n’arrête pas de se réinventer.

 

En 2000, lors d’une exposition à Genève, Yvonne Bekker, originaire d’Afrique du Sud, a présenté un rouleau à pâtisserie qu’elle venait de breveter. Perforé tout du long, il permettait de libérer régulièrement une couche de farine contenue à l’intérieur. Bekker ne pouvait plus supporter que la pâte reste collée à son  rouleau, d’où cette idée ingénieuse. D’autres, à sa place, auraient peut-être juste changé la recette de la pâte.

 

Pour éviter le mauvais sort

Et comme la cuisine tout entière est remplie de sentiments, le rouleau à pâtisserie qui en est un habitant essentiel, ne pouvait pas ne pas garder un reflet de cet amour.

Les Américains, par exemple, gardent dans des musées les rouleaux du 19ème siècle, et dans leurs cœurs la mémoire de leur citoyen John Reed qui, en 1864, a inventé une des variétés des rouleaux (aux poignées). Cet homme a inventé et patenté pourtant d’autres inventions mais c’est grâce au rouleau que son nom vit toujours outre-Atlantique.

Les Anglais n’ont pas de nom précis associé à l’invention du rouleau mais l’histoire de cet objet de l’autre côté de La Manche est encore plus sentimentale. Il paraît que les marins partant en long voyage offraient à leurs femmes des rouleaux en verre. Ces objets servaient à toutes sortes de superstitions. Les femmes des marins remplissaient ces cylindres vides de sel, supposé  protéger contre les malheurs. Et un rouleau cassé ou fissuré ne présageait rien de bon.

Ces beaux objets que les Anglaises d’ailleurs n’utilisaient pas trop par peur de les casser, étaient souvent gravés d’inscriptions personnelles ou d’images de bateaux. Ils sont toujours gardés dans des familles comme de très chers souvenirs.

Sur le continent par contre, et surtout en Allemagne,  la gravure sur les rouleaux a toujours existé par pure utilité. Les cylindres à motifs, géométriques, floraux ou encore plus élaborés, fonctionnaient comme des planches à imprimer pour les pains d’épices ou les springerle (biscuits à l’anis décorés).

 

 

Les exemplaires anciens sont devenus des pièces de musée. En France, on peut les voir à Bonnieux (Vaucluse) au Musée de la boulange et bien entendu en Alsace, dans deux musées de pains d’épices. La collection la plus complète d’objets très beaux et très rares se trouve à Berlin, au Musée de cultures européennes (MEK).

En revanche, le rouleau à pâtisserie ne semble pas trop intéresser les artistes des temps modernes. Sauf, peut-être, les créateurs de dessins animés où il est souvent utilisé comme une arme d’attaque. Retenons seulement de cet usage secondaire la preuve de l’importance du rouleau dans la cuisine : il est toujours à portée de main !