Depuis quatre générations, la famille Dubois transforme le blé en farine dans son moulin. Olivier, le meunier actuel, nous ouvre les portes de la minoterie de Leforest, dans le Pas-de-Calais. Et nous fait découvrir comment il orchestre en ces lieux une production durable de farine, profondément ancrée dans son territoire.
 

Implantation territoriale de la minoterie de Leforest

Pour se rendre à la minoterie de Leforest, il faut prendre la direction du bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, où l’exploitation de la houille rythma, longtemps, la vie des populations. Autour du moulin, des vestiges sont là pour le rappeler, à commencer par les corons, maisons en briques alignées où vivaient autrefois les mineurs. Des chevalets se devinent à l’horizon, des terrils également.

Au cœur de cette région chargée d’histoire, la minoterie témoigne elle aussi, depuis des décennies, de l’importance des liens qui peuvent unir une activité humaine et un territoire. C’est d’ailleurs aujourd’hui l’un des axes forts de développement porté par son directeur, Olivier Dubois, dont la famille transforme les grains en farine depuis quatre générations. « Nous sommes avant tout une minoterie implantée dans sa région, explique le meunier. Nous cherchons à travailler en circuit court, en favorisant l’économie locale ».

Olivier Dubois présentant les pains réalisée au fournil de la minoterie de leforest

Olivier Dubois, Directeur de la Minoterie Leforest (Copyright François Desnoyer)

Pour preuve : les blés 100% français utilisés pour produire ses farines proviennent aux deux tiers des Hauts-de-France la moyenne de provenance est de 120 km », précise-t-il). Des farines qui rejoindront ensuite les fournils des artisans boulangers de la région. Lesquels pourront valoriser auprès de leurs clients ce cercle de proximité permettant de concevoir des pains de qualité.

 

La fabrication de la farine au moulin

C’est un ballet parfaitement maîtrisé qui rythme la vie du moulin de Leforest et de ses 22 salariés. Des camions y livrent régulièrement les blés (30.000 tonnes par an au total) qui vont être stockés dans 7 silos dédiés, répartis en fonction de leur provenance et de leur variété. Les grains auront également été analysés à la réception (humidité, teneur en protéines, état sanitaire…). En suivant les mélanges de blés prédéfinis par les équipes de la minoterie, une quinzaine de type de farines panifiables, répondant aux attentes des boulangers comme des consommateurs, vont être produites par le moulin. Elles diffèrent selon les proportions de blés mélangées, l’origine des grains, la couleur qu’elles donneront au pain… « 100 kg de blé vont permettre de produire 78 à 80 kg de farine », indique Olivier Dubois.

Minoterie Leforest : réception du grain et machine à cylindre

Réception du grain à la minoterie Leforest (Copyright François Desnoyer) et machines du moulin (copyright Minoterie Leforest)

Pour ce faire, tout un processus est en place, mêlant savoir-faire des équipes et innovation technologique. Après les étapes de mouillage et de repos, les blés passent en mouture. Ils sont introduits à plusieurs reprises dans des appareils à cylindre afin d’extraire, progressivement, la précieuse farine. Ces opérations de broyage et tamisages se succèdent pour séparer les sons de l'amande. Des analyses ont régulièrement lieu pour s’assurer du respect des caractéristiques attendues. La production rejoint ensuite des silos. Les farines bénéficient d’un temps de repos indispensable à leur bon usage chez l’artisan boulanger. Enfin, elles sont livrées en sac ou en vrac chez les professionnels, non sans avoir été à nouveau analysées.

Lire notre dossier sur la fabrication de la farine

Minoterie Leforest : un moulin engagé pour l'environnement

Les blés avec lesquels travaille le moulin ont une spécificité : ils sont garantis sans traitement de stockage. Cette évolution fait partie des engagements environnementaux pris par la minoterie, en lien avec l’adoption de la norme française V30-001 (correspondant à la Charte de production agricole française) qui implique tout un ensemble de bonnes pratiques. En conséquence, un soin tout particulier est apporté à la propreté des installations et des ateliers. « Cela implique de nettoyer quatre fois plus souvent  les outils de production afin d’éviter toute prolifération d’insecte », souligne Olivier Dubois.

Pour la minoterie de Leforest, la transition écologique passe également par une réduction des émissions carbone liées aux livraisons. « Nous avons investi dans des outils optimisant les tournées, explique le meunier. Ils nous ont permis de réduire la distance totale parcourue de 28.000 km par an ». Autre initiative : un nouveau carburant va être utilisé dès l’automne 2021 pour les tournées. « L’ensemble de nos livraisons en sacs vont être réalisées avec Oléo100, qui est issu à 100% de colza français, poursuit le directeur du moulin. Cela diminuera de 60% nos émissions ». 

Dans le même temps, le moulin a mis en place « un cycle vertueux » qui lui permet de n’avoir aucun déchet. « 100% de nos produits sont vendus », indique Olivier Dubois. Son et remoulage vont prendre le chemin d’usines d’aliments du bétail. Les pailles et glumes rejoignent, de leur côté, la filière méthanisation.

 

Baguettes et pains à la chicorée

Soucieux de développer une production durable de ses farines, la minoterie s’intéresse aussi à la qualité des produits boulangers, en aval. Dans la cour de l’entreprise, un bâtiment attire l’œil. Sur son fronton, une enseigne : « Au-delà de la farine ». C’est ici que se trouve le fournil du moulin. Frédéric Thellier, boulanger-conseil, y réalise de multiples essais. Baguettes, brioches, pains à la chicorée… De nouvelles recettes naissent au quotidien. Elles seront transmises aux artisans boulangers si elles sont validées.

Frederic Thellier au fournil de la minoterie Leforest

Frederic Thellier au fournil de la minoterie Leforest (Copyright François Desnoyer)

C’est aussi un lieu d’échange, de partage, qui doit permettre de mieux comprendre les besoins des professionnels et d’y répondre. « Le métier de meunier demande d’être à l’écoute de nos clients et de percevoir leurs attentes ainsi que celles des consommateurs », indique Olivier Dubois. De quoi permettre à la minoterie de Leforest de gagner en efficacité en ciblant au mieux ses productions. Mais aussi, pour le directeur des lieux, de donner du sens au travail mené par les équipes du moulin : « C’est ma plus grande satisfaction à la tête de la minoterie : parvenir à accompagner nos clients artisans boulangers vers la réussite ». 

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