Avant de devenir agriculteur, Grégoire de La Roussière était ingénieur du son. Il a travaillé dans l’industrie musicale pendant dix ans.  «J’étais un bobo parisien avec  plein de clichés sur l'agriculture,  puis j’ai progressivement  ouvert les yeux...et mes oreilles ! »

« Le bruit rythmé de la moissonneuse me fait penser aux percussions d’une batterie. Quand je moissonne, j’imagine des musiques pour les accompagner ! ». 

Crâne rasé, lunettes à grosse monture, Grégoire a rencontré le métier grâce à sa femme, fille d’agriculteurs. Après trois année d'apprentissage « sur le tas », Il a suivi une formation accélérée, un Brevet Professionnel de Responsable d'Exploitation Agricole, puis il s’est installé en 2011 près de Castelnaudary où il cultive aujourd’hui 70 hectares de maïs, de blé dur, de tournesol, de semences potagères (betteraves, oignons, céleri, choux, carottes...) et de fraises

Grégoire a quitté Paris pour les champs du Languedoc-Roussillon. Mais sa passion pour la musique et les sons est intacte. « Et sur une exploitation agricole, on n’est jamais déçu. » Il y a d’abord les sons de la nature, du vent et de la pluie. « Quand la moisson approche, les blés en train de sécher font un bruit très particulier. Ils ondulent avec le vent et on entend comme une mer douce. »

Folk, rock et chant des grillons

La plaine du Lauragais où se situe l'exploitation est entourée de massifs : la Piège et la Montagne noire. « Ce sont les contreforts des Pyrénées et du Massif Central Ici les paysages sont magnifiques, légèrement vallonnés et peuplés d’animaux. J’y retrouve l’harmonie que j’aime dans la musique. » Fan de pop anglaise des années 60 et de rock indépendant, Grégoire écoute aussi  le chant des palombes et des grillons l’été. « Les lapins et les renards sont plus discrets, mais j’adore les rencontrer dans le noir. Quand la nuit est tombée et qu’on travaille encore, on voit juste leurs yeux briller. »

Les sons d’une exploitation sont aussi mécaniques. « J’aime le cliquetis des asperseurs d’eau. Quand j’étais un citadin, je pensais que les agriculteurs étaient des gaspilleurs d’eau. Mon approche était encore assez binaire : les bios contre les grosses exploitations, les gentils contre les méchants. J’ai appris la nuance. Sans eau, une plante ne peut pas pousser. Ici, l’irrigation est vitale.  Mes enrouleurs, mes asperseurs sont indispensables pour créer et partager de la vie sur nos territoires. J’aime aussi leurs sons ».

Sur son lecteur MP3, Grégoire a une playlist éclectique. Il écoute dans ses champs, Phoenix, Miles Davis, les Beatles ou encore les Beastie Boys et Hot Chips. Et pendant la moisson, le bien-nommé album Harvest (Récolte) de Neil Young.