Le 3 novembre dernier, Passion Céréales vous emmenait en voyage dans l’imaginaire des céréales de 6 personnalités inspirantes à Lyon. Découvrez ou redécouvrez cette soirée exceptionnelle à la Comédie Odéon.

« Dès qu'il y a de l'agriculture, il y a de la vie ». Stéphane Peillet sait de quoi il parle. Le céréalier surveille depuis de nombreuses années, comme le lait sur le feu, l'évolution de ses cultures et observe avec patience leur lente croissance. Conscient qu'un aléa n'est jamais loin et, dans le même temps, émerveillé par le spectacle de cette nature en mouvement. « Je prends plaisir à venir contempler mes champs, explique-t-il. J'aime ce petit matin sur l'Est lyonnais où l'on peut voir les chevreuils courir à travers mes parcelles. »

L'univers céréalier, source de vie et, plus encore, évocation de temps forts de l'existence, compagnon de moments où l'homme se sent... vivant. C'est cette réalité dont ont témoigné les personnalités présentes lors du Voyage dans l'imaginaire des céréales organisé à Lyon, le 3 novembre dernier par Passion Céréales. Dans l'écrin rouge du délicat café-théâtre de la Comédie Odéon, elles se sont succédées sur scène pour livrer leur regard sur ces céréales qui guident aujourd'hui leur parcours.

C'est le cas de Marc Boissieux, lauréat du concours Masterchef 2013. Pour comprendre son lien à l'art culinaire, il faut remonter à l'enfance. Celle des repas à la maison, de « cet esprit de fête qui régnait, empli de convivialité et de volonté de donner du plaisir. » Arrivés d'Algérie à Lyon avant même sa naissance, ses parents ont gardé ce goût du partage autour d'un plat qui régnait en maître en Afrique du Nord : le couscous. « Maman cuisinait beaucoup ». La cuisine est donc restée pour lui intimement liée au souvenir de ces tablées chaleureuses, pleines d'échanges et de vie.

L'enfance n'est d'ailleurs jamais loin lorsque les céréales sont évoquées. Ce n'est pas le chef savoyard Laurent Petit qui dira le contraire, évoquant avec gourmandise « la tartine au retour de l'école. Elle est là, la madeleine de Proust ! Nous sommes véritablement nés avec les céréales. » Des céréales qui l'ont poursuivi au fil de sa carrière, notamment à travers la polenta qu'il ne se lasse de travailler, en frite ou en crème, depuis plus de 20 ans. « Lorsque nous avons lancé notre restaurant gastronomique à Annecy, il fallait trouver une identité culinaire, en s'appuyant notamment sur le territoire. La polenta en faisait partie. Je me suis intéressé à elle. Elle ne m'a pas quitté. »

Une vie professionnelle marquée par les céréales, c'est également l'aventure qu'a vécue Antoine Chiron, directeur d'Alpina Savoie, société produisant notamment les crozets, pièce maîtresse du patrimoine culinaire savoyard. Progressant dans les échelons de l'entreprise depuis 1987, il reconnaît bien volontiers que l'enfant qui rêvait de « dessiner des carrosseries de voiture a vu finalement son histoire personnelle se construire autour des pâtes et des semoules ». Avec des moments forts, marquants, comme la construction, en 1994, du moulin de blé dur le plus moderne d'Europe.

Mais si les céréales et leurs produits transformés sont associés aux parcours de vie dans l'imaginaire collectif, n'est-ce pas, aussi, tout simplement parce qu'ils sont eux-mêmes... vivants ? Pour s'en persuader, il suffit d'écouter Laurence Bérard, ethnologue au CNRS. Elle s'est passionnée pour l'étude du levain en suivant le travail de boulangers et le numéro d'équilibriste qu'ils mènent dans le secret de leur atelier pour obtenir le bon pain. « Ils travaillent et font vivre leur levain au quotidien, témoigne-t-elle. Ils choisissent une certaine température pour que l'acide lactique l'emporte, la diminue pour garder l'acide acétique... C'est impressionnant de voir leur volonté de contrôler ce vivant invisible ! »

L'histoire est, au fond, un peu la même lorsqu'on se penche sur la fabrication de la bière. Benoît Ritzenthaler, à la tête de la brasserie de la Pleine Lune, dans la Drôme, rappelle que « le malteur doit faire germer l'orge et stopper le processus à un moment précis. » Le brasseur, quant à lui, aura la lourde tâche de créer une bière, à partir des ingrédients dont il dispose, jouant notamment avec ce houblon qui apportera des saveurs multiples : mandarine, raisin... Du travail de ces artisans-créateurs naîtra des bières moelleuses ou caramélisées, tantôt rondes, tantôt sèches... « C'est la magie de la bière ! », résume le brasseur drômois.

Un émerveillement célébré également par Laurent Petit, lorsqu'il se penche sur le pain. A l'écouter, nul doute possible, il s'agit là de la matière la plus vivante qui soit. Une preuve ? C'est une affaire de nez... « Sentez-le à sa base, sentez-le à son sommet... L'odeur n'est pas la même ! Sentez alors la mie, elle est là aussi tout autre ! » Et le chef de conclure, dans un sourire : « Seules les céréales peuvent apporter cette magie. »